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dimanche, juillet 24, 2011

Et la mort n'aura pas d'empire


Et la mort n'aura pas d'empire.
Les morts nus feront foule
Avec l’homme dans le vent et la lune rousse;
Quand leurs os blanchiront et leurs os blancs partiront,
Ils auront des étoiles au coude et au pied;
Même s'ils sont fous, ils seront sains d’esprit,
Même s'ils sont perdus en mer, ils reviendront;
Les amoureux seront égarés mais l’amour restera;
Et la mort n'aura pas d'empire.
Et la mort n'aura pas d'empire.
Sous les rouleaux de la mer
Ils demeureront à l'abri de la tourmente;
Torturés pour que lâchent leurs nerfs,
Attachés à une roue, ils ne cèderont pas;
La foi en leurs mains éclatera,
Et les diables cornus les piétineront;
Écartelés de toute éternité, ils ne céderont pas;
Et la mort n'aura pas d'empire.
Et la mort n'aura pas d'empire.
Plus aucun cri de mouette à leurs oreilles
Ou le déferlement des vagues sur les rivages;
Où la fleur s'épanouit peut-être qu'aucune fleur
Ne lèvera son front aux coups de la pluie;
Bien qu’ils soient fous et raides comme des clous,
Leurs têtes laboureront les champs de marguerites;
Brisés par le soleil jusqu’à ce que le soleil se brise,
Et la mort n'aura pas d'empire.
traduit de dylan thomas

mardi, juin 06, 2006

hymne à la beauté


Viens-tu du ciel profond ou sors-tu de l'abîme,Ô Beauté ?
ton regard infernal et divin,Verse confusément le bienfait et le crime,
Et l'on peut pour cela te comparer au vin.
Tu contiens dans ton oeil le couchant et l'aurore;
Tu répands des parfums comme un soir orageux;
Tes baisers sont un philtre et ta bouche une amphore
Qui font le héros lâche et l'enfant courageux.
Sors-tu du gouffre noir ou descends-tu des astres ?
Le Destin charmé suit tes jupons comme un chien;
Tu sèmes au hasard la joie et les désastres,
Et tu gouvernes tout et ne réponds de rien.
Tu marches sur des morts, Beauté, dont tu te moques;
De tes bijoux l'Horreur n'est pas le moins charmant,
Et le Meurtre, parmi tes plus chères breloques,
Sur ton ventre orgueilleux danse amoureusement.
L'éphémère ébloui vole vers toi, chandelle,Crépite, flambe et dit : Bénissons ce flambeau !
L'amoureux pantelant incliné sur sa belle
A l'air d'un moribond caressant son tombeau.
Que tu viennes du ciel ou de l'enfer, qu'importe,
Ô Beauté, monstre énorme, effrayant, ingénu!
Si ton oeil, ton souris, ton pied, m'ouvrent la porte
D'un Infini que j'aime et n'ai jamais connu ?
De Satan ou de Dieu, qu'importe ? Ange ou Sirène,
Qu'importe, si tu rends, - fée aux yeux de velours,
Rythme, parfum, lueur, ô mon unique reine !
-L'univers moins hideux et les instants moins lourds.

écrit par Charles Baudelaire (extrait des Fleurs du Mal)